Un caisson dans son cabinet

Dans le cabinet du docteur Jörg Schmutz, à Bâle, en Suisse, trône un énorme caisson hyperbare qui sert (très peu) pour les accidents de plongée, beaucoup pour les maladies de ses patients et un peu pour un usage hors du commun. out au début de sa vie, Monsieur Schmutz voulait faire du cinéma. C’est lui qui me l’a confié, dans son cabinet, un matin quasi torride de juin. Je n'étais pas allée le voir parce que j’avais fait une remontée trop rapide dans le lac de Thoune, mais pour élucider le mystère du pourquoi il y avait un caisson hyperbare chez un généraliste de Bâle. Docteur Schmutz résume son parcours en quelques phrases : « J’ai fait médecine par hasard. Quand il m'a fallu choisir une spécialité j’ai d’abord pensé à la psychiatrie, mais c’était trop déprimant. Alors je suis parti au Mexique faire de la médecine tropicale. Au bout de deux ans il y a eu une restructuration de mon département et, puisque j’étais le plus jeune, c’est moi qui ai du partir. J’ai lu un article sur l’utilisation de la médecine hyperbare dans le traitement de la sclérose en plaques et j’ai décidé de suivre cette voie. » C’était en 1985 et Jörg Schmutz ignorait tout de la plongée; mais il a été conforté du bon choix de sa spécialité par l’efficacité de ses traitements. Avec l’accord de sa « très gentille » femme, il s’endette jusqu’au cou pour acheter un caisson, situé à l’époque dans une belle maison de Bâle. « Il a fallu ouvrir la maison pour le sortir et à l'époque, notre immeuble étant en construction, on a juste dû creuser le trottoir pour l’installer. Le caisson repose depuis ce jour sur quatre piliers en acier vissés dans la cave. » Et il pèse combien votre caisson ?: « Douze tonnes, parce qu’il va jusque 100 mètres de profondeur. » A partir du moment où Dr Schmutz s’est installé, avec son caisson, dans son immeuble flambant neuf, il commence à entrer en contact avec une nouvelle population : les plongeurs. Heureusement ils ne viennent que rarement pour des accidents de plongée (de 6 à 25 par an sur une période de 10 ans) ; en fait, ils prennent surtout rendez-vous pour un certificat médical ou des douleurs qui entrent dans ce que l’on appelle la « zone grise ». C'est à dire ceux qui ressentent des douleurs très fortes dans le dos ou des vertiges après une plongée et, qui ont un doute. En peu de temps, Jörg Schmutz est mordu par le virus et apprend à plonger, entraînant toute sa famille avec lui. Il a la chance de pouvoir partir parfois faire de l’oxygénothérapie hyperbare dans des endroits où il fait bon plonger, comme les Maldives par exemple. Sur l’écran de son ordinateur, Dr Schmutz me montre quelques photos d’exemples de l’efficacité de cette médecine sur des lésions diverses. C’est très bien, mais c’est un peu, comment dire, médical. Ça ne convient pas vraiment à Plongeur.com. Puis il m’explique le troisième usage du caisson : « Ici en Suisse, parfois on s’ennuie un peu l’hiver. Pour s’éclater, je propose des plongées à 57 mètres pour déguster l’ivresse des profondeurs. » Jörg Schmutz utilise des tables modifiées pour gérer la décompression de ces plongées à l’air et au sec et finit sur les temps de plongée affichés par les ordinateurs personnels de ses clients. Il fait environ une « plongée » par mois en hiver mais puisque c’est le même prix pour une personne ou pour huit, il essaie de remplir le caisson. « Je leur dis toujours de prendre la moitié de filles et la moitié de garçons parce que les mecs ne savent pas rigoler. Les nanas s’éclatent et il y a une super ambiance ! » Pour ceux qui se sentent bizarre « à la remontée » il y a de l’oxygène à portée de main à partir de six mètres. Et ça arrive souvent de se sentir bizarre ? : « Non, pas vraiment; c’est seulement quand ils ont trop rigolé ! » Si l’expérience vous tente, la « plongée » dure environ 75 minutes et coûte 660 CHF (francs suisses), donc environ 500 euros. Et une dernière petite information... les ordinateurs Suunto sont les plus exigeants en ce qui concerne le temps de décompression ! Docteur Jörg Schmutz Kleinhüningerstrasse 177 CH 4057 Basel Tél. : 0041.616.31.3013 - E-mail